En novembre 1994, le RQIC a pris la succession de la Coalition québécoise sur les négociations trilatérales (CQNT) qui avait été mise sur pied en avril 1991, dans la foulée de l'ouverture des négociations que le Canada, les États-Unis et le Mexique avaient engagées à ce moment-là en vue d'en arriver à la signature d'un Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).
La CQNT reprenait à son tour le mandat d'une précédente coalition rassemblée pour faire opposition à l'ALE, l'accord bilatéral de libre-échange entre le Canada et les États-Unis qui est entré en vigueur le premier janvier 1989. Cette Coalition québécoise d'opposition au libre-échange était formée des quatre centrales syndicales, la CEQ, la CSN, la FTQ et l'UPA.
La CQNT s'était donné trois objectifs: premièrement, critiquer l'approche réductrice, c'est-à-dire exclusivement commerciale et tarifaire, adoptée par les trois partenaires tout au long de leurs délibérations, deuxièmement, porter le débat sur la place publique en organisant rencontres, colloques et conférences de presse, tout en sollicitant des entrevues auprès des responsables de ce dossier au niveau politique et, troisièmement, participer à la mise sur pied de rencontres et d'échanges avec des syndicats, des associations ou des groupes qui, à l'échelle du continent, partageaient cette approche critique vis-à-vis du projet d'intégration en cours d'implantation.
Dès le départ donc la CQNT, puis le Réseau à sa suite, ont contesté l'interprétation minimaliste d'un projet de libre-échange continental et se sont opposés à la sanction d'une approche exclusivement douanière et commerciale quand il s'agissait de relever des défis qui devaient faire appel à des considérations de tout autre ordre afin d'instaurer une croissance équilibrée et un partage équitable à l'échelle continentale.
Or, si les responsabilités assumées au nom des associations et groupes membres de la CQNTde faire valoir un point de vue social, féministe, populaire, autochtone et environnemental dans la foulée des négociations en cours tombaient en partie d'elles-mêmes en quelque sorte avec la signature de l'ALÉNA, il ne fallait pas non plus faire relâche puisque l'Accord était toujours susceptible d'accueillir de nouveaux partenaires, comme on l'a vu quand il a été question que le Chili se joigne aux trois autres, et qu'il pouvait s'avérer imprudent de s'éloigner d'un dossier qui pouvait toujours être réouvert à n'importe quel moment à la demande des États-Unis, en particulier, pour y débattre de nouvelles questions et y régler de nouveaux problèmes. En ce sens, chaque sollicitation nouvelle pouvait et devait être l'occasion de revenir sur les termes de l'Accord et de soulever à nouveau l'ensemble des enjeux qui avaient été discutés les fois précédentes. Et, pour que cette mission ne s'avère pas une opposition de pure forme, c'est-à-dire pour qu'elle puisse s'appuyer sur une expérience acquise et une formation continue, il fallait que le dossier demeure ouvert et que le RQIC continue, tant aux yeux du public qu'aux yeux des gouvernements, de s'impliquer dans ce genre de questionnement.
Maintenant que l'Accord est signé et que l'intégration économique progresse à grands pas, il est essentiel de se pencher sur les modalités d'implantation des dispositions de l'Accord dans tous les domaines qui sont couverts aussi bien par l'Accord lui-même que par les deux accords parallèles portant respectivement sur le travail et l'environnement d'une part, dans tous les domaines qui, tout en n'étant pas couverts, risquent d'être affectés de l'autre. À cet égard, il était indispensable que le RQIC se fasse connaître aux yeux du public comme une instance qui continue de suivre ce dossier et qui interviendra au besoin pour souligner, toutes les fois où cela s'avérera nécessaire, les effets négatifs de l'intégration continentale sur tel ou tel secteur de l'économie, sur tel ou tel groupe dans la société.
Au surplus, la critique de l'intégration économique a pris une nouvelle tournure avec l'ouverture des négociations entre les trente-quatre partenaires des Amériques en vue d'en arriver à la signature d'un Accord de libre-échanges des Amériques (ALÉA), d'ici 2005.
Les négociations en cours autour de ce projet qui déborde les questions commerciales et qui couvre également une foule d'autres domaines comme la pauvreté, la démocratie ou l'éducation exigent la poursuite et l'approfondissement des initiatives engagées autour du développement d'une véritable solidarité hémisphérique. Ici encore, la CQNT avait joué un rôle important qui l'avait conduit à se démarquer et à faire valoir sa propre interprétation des effets nuisibles du projet d'intégration engagé sous l'égide des paramètres du néo-libéralisme, tout en mettant de l'avant un contre-projet qui rejoignait, sur plusieurs points, des revendications issues d'autres coalitions à l'échelle continentale, et c'est précisément cet objectif que le RQIC entend favoriser et intensifier en organisant rencontres, manifestations et colloques.
Pour fragile que soit la solidarité qui a été tissée entre les adversaires du libre-échangisme à l'échelle continentale, il n'en demeure pas moins que, ici comme ailleurs, cette solidarité doit être entretenue en tant que telle et pour ce qu'elle est, c'est-à-dire en tant que nouvelle conscience sociale en émergence à l'intérieur de l'espace des Amériques.
Nous
savons que l'intégration à l'échelle continentale appelle
la création et la mise sur pied de nouveaux acteurs et de nouveaux
réseaux dans tous les domaines, dans tous les secteurs de la vie économique,
politique, sociale, culturelle, scientifique. Mais nous savons également
que l'intégration continentale contribue à accroître l'exploitation
des travailleurs et des travailleuses, qu'elle exacerbe l'épuisement
des ressources, qu'elle intensifie la spoliation des autochtones et qu'elle
avive la discrimination entre les sexes et entre les générations,
comme l'illustrent les collaborations et les témoignages rassemblés
lors des rencontres et colloques que nous avons déjà tenus sur
ces questions.
Ce site a été construit par différents stagiaires, dans le cadre des stages Furetez dans le monde 1999, 2000 et 2001 d'Alternatives